
François Hollande : "Le sentiment d’insécurité est sans doute plus grand aujourd’hui qu’il n’était hier"
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François Hollande, qui a eu à gérer comme président de la République, la vague des attentats de 2015, revient sur ces évènements tragiques.
Comment avez-vous appris l'attaque de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015 et quels ont été vos sentiments ?
"Ce jour-là, je suis à mon bureau à l’Elysée. Je me prépare à recevoir le nouveau président de Total. Le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve m’alerte qu’une attaque serait en cours
dans l’immeuble de Charlie Hebdo, mais je n’en connais pas encore la gravité ni l’ampleur. Quelques minutes plus tard, je reçois un coup de téléphone de Patrick Pelloux, l’urgentiste, qui
est aussi membre de la rédaction. Il est sur les lieux et me décrit dans des sanglots la scène de crime. Je décide de me rendre sur les lieux. Je suis en face de l’immeuble et je vois les
blessés qui sont évacués. Le nombre des victimes m’est dressé et je revois tous ces visages que je connais car j’avais rencontré, quelques semaines avant, la rédaction de Charlie Hebdo,
Charb, Tignous, Cabu, Maris... qui m’avaient parlé des difficultés financières du journal. Je connaissais déjà beaucoup de ces caricaturistes. Je suis lié comme beaucoup de Français par la
sympathie que nous avons à l’égard de ces journalistes.
Je m’adresse alors aux Français depuis la rue pour dire que c’est un acte terroriste et qu’il faut rester unis.
Ma crainte alors, et celle que j’aurai aussi le 13 novembre, c’est que les Français, par peur, se replient sur eux-mêmes. Aussi, j’appelle au sursaut, au courage et à l’unité face à cette
attaque terroriste. Après l’assassinat de la policière et la prise en otage de l’Hyper Cacher, la grande manifestation du 11 janvier montrera les ressorts de nos concitoyens et leur capacité
à se mobiliser pour la liberté d’expression et contre l’antisémitisme.
Comment se prend la décision de l'assaut, le 9 janvier, l'une des plus importantes de votre mandat ? Le 9 janvier, je suis entouré de Manuel Valls, Bernard Cazeneuve, Christiane Taubira et
de mes conseillers les plus proches. Je suis confronté à la prise d’otages à l’Hyper Cacher qui a déjà fait quatre morts et à la fuite des deux frères Kouachi dans l’imprimerie de
Dammartin-en-Goële où était par ailleurs caché un jeune employé. Si je lançais trop tôt l’assaut pour neutraliser les premiers, le risque était grand que le terroriste Coulibaly se venge sur
les otages. J’avais donc décidé qu’à 18 heures, un double assaut serait donné. Mais les frères Kouachi sortent avant 18 heures de l’imprimerie. Je demande alors à Bernard Cazeneuve de
précipiter nos actions pour qu’il y ait cette concomitance. Vous imaginez le courage de ces gendarmes et de ces policiers ! J’avais le souvenir de ce qui s’était passé à Toulouse en mars
2012 dans l’affaire Merah où une longue négociation avait eu lieu et je ne voulais pas refaire ce scenario. Je pensais qu’il fallait aller vite. Ce fut un considérable soulagement quand
Bernard Cazeneuve a reçu l’appel des forces de l’ordre qui nous confirmait que les otages étaient saufs et que les terroristes avaient été neutralisés.
Nos principes de laïcité sont-ils suffisamment entendus, défendus depuis 10 ans ? Aucun écart à ces principes ne devrait être toléré. J'en observe pourtant : des vêtements qui sont acceptés
et qui ne devraient pas l’être, des cours qui ne sont pas dispensés comme ils devraient, des sujets qui ne sont pas abordés y compris dans la presse, des livres qui ne sont pas publiés de
crainte des effets générés.
Et puis je relève des mises en cause de la liberté d’expression encore plus insidieuse car elle est technologique, sur les réseaux sociaux. Certains libertariens au nom d’une liberté absolue
autorisent tout, y compris le racisme, l’antisémitisme, le complotisme... Cet absolu de liberté porte atteinte à des droits fondamentaux et laisse passer des messages de haine sans sanction
ni procès.
En 10 ans, qu'est-ce qui a changé ? Sur la sécurité, les choses ont avancé. Trois lois ont été adoptées sous ma présidence pour renforcer les dispositifs de lutte contre le terrorisme,
améliorer le renseignement, coordonner davantage nos actions avec les pays européens. Nos décisions d’engagement en Syrie et en Irak ont permis d’éradiquer Daesh. La vigilance sur les
phénomènes de radicalisation venant de l’extérieur s’est accrue... mais il n’empêche : des actes terroristes ont été commis même s’ils ne sont plus menés par des organisations structurées
mais par des individus isolés. Je pense aux assassinats de Samuel Paty et Dominique Bernard.
Après une formidable cohésion au lendemain des attentats, comment faire en sorte que l'unité du pays perdure, alors qu'on le voit, elle est souvent mise à mal ? Le terrorisme produit une
sidération quand les attaques surviennent et représente un poison lent sur la durée. Le choc favorise des cohésions formidables et l’unité nationale survient dans la foulée des évènements.
Le venin, lui, se répand et les tentations de repli, de défiance, de peur se font, jour après jour, plus fortes au point de fracturer le pays. C’est ce que recherchent les terroristes, ils
veulent nous diviser.
Ce qui s’est dégradé depuis 10 ans, c’est la confiance envers les institutions et, plus largement, dans le rapport à l’autre. C’est le plus grave. Nous sommes plus défiants, plus apeurés
compte tenu de tout ce qui se passe dans le monde, plus frileux au regard de la violence au sein de la société. Laquelle est moins harmonieuse, moins unie qu’il y a 10 ans. Paradoxalement,
alors que l’on est sorti de cette vague d’attentats, le sentiment d’insécurité est sans doute plus grand aujourd’hui qu’il n’était hier."
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